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16 mars 2010 2 16 /03 /mars /2010 15:16

Matrix

 

Un film hautement initiatique

 

 

 Matrix-code2

 

 

 

Signé par deux jeunes réalisateurs, les frères Andy et Larry Wachowski, Matrix connut un succès fulgurant. Dans les jours qui suivirent sa sortie, on parlait déjà de « film-culte ». Les milieux intellectuels s’enthousiasmèrent d’autant plus qu’on découvrait un ouvrage du philosophe et sociologue Baudrillard dans les mains du personnage principal de l’histoire. Pour la sortie de Matrix II – Reloaded, il y eut même un colloque au centre Beaubourg.

 

Non seulement cette œuvre fut jugée remarquable par la mise en scène et le jeu des acteurs (Keanu Reeves, Carrie-Ann Moss ainsi que Laurence Fischburne et Hugo Weaving) mais encore pour son scénario se révélant d’autant plus fascinant qu’il juxtaposait trois thèmes principaux. D’abord celui de « l’intelligence artificielle » qui, exprimant le mythe de Prométhée ou de Faust, met en scène la figure de l’apprenti sorcier devenu, modernité oblige, informaticien de génie : la créature (en l’occurrence un cerveau cybernétique) se retournant contre son créateur. Puis, en second, propose une angoissante interrogation – convoquant Platon, Heidegger et Baudrillard – sur la notion de réalité. Un Hindou traditionnel verrait dans le virtuel une manifestation supplémentaire de la Maya, c’est-à-dire de l’apparence du monde comme illusion. Car, dans Matrix, virtuel et réel s’entrelacent de façon à piéger sans cesse la tangibilité de ce qui nous entoure. En un mot, l’ultime tentation de l’apprenti sorcier serait-elle de fabriquer une illusion d’existence aliénant définitivement le genre humain ?

 



Copiede33c

 

 

L’évocation de Platon et le principe de la Maya introduisent le troisième thème : l’attente d’un rédempteur de l’Humanité. Mais, avant de l’évoquer intervient le domaine de la connaissance initiatique. On pourrait, d’une certaine façon, comparer Matrix à la « Flûte enchantée » de Mozart car le symbolisme maçonnique y joue un rôle essentiel. Ne prenons qu’un seul exemple : le patronyme du héros, Thomas Anderson, fait songer à celui du rédacteur en 1717, des Constitutions maçonniques, le pasteur James Anderson. Simple coïncidence ? Sans doute pas puisque le prénom Thomas fait référence à l’apôtre considéré comme le saint patron des maçons et des architectes. De plus, l’apôtre Thomas est l’auteur d’un évangile apocryphe qui a pour nom « L’Evangile de Thomas » retrouvé dans les écrits gnostiques découvert à Nag Hammadi, en Egypte, en 1945. Thomas eut pour nom Dydime Jude Thomas ; dydime en grec signifie « jumeau », tout comme « jumeau » signifie, en syriaque, le nom tauma, dont dérive Thomas. Il s’agit bien entendu d’une parenté spirituelle : Dydime Thomas était considéré comme le double terrestre de Jésus.

 



1h73-02                    Hydra

 

 

A noter, au passage, que le concepteur de la Matrice est précisément appelé « l’Architecte ». De plus, Anderson signifie tout simplement fils d’André. Supplicié sur la croix en X symbolisant la dimension céleste de l’être, saint André est associé à l’Ecosse et, de la sorte, à la Franc-Maçonnerie. Mais c’est sans doute avec ce qui suit que quelque chose de beaucoup plus singulier encore intervient dans le film. Ces références à des données maçonniques sont comme le vestibule d’un autre mystère. Ou, si l’on préfère, elles servent de vecteur à une thématique autrement plus ancienne que la Maçonnerie spéculative du XVIIIe siècle : la notion de Tradition primordiale qui, selon des auteurs tels que René Guénon et Julius Evola, constitue la clef de voûte de tout l’ésotérisme. Or, la notion de Tradition primordiale a pour corollaire la doctrine des Quatre Ages selon laquelle l’Histoire du genre humain n’est pas évolutive et progressiste mais, tout au contraire, cyclique et involutive. L’homme du dernier âge (associé au fer par Hésiode et les Perses et qualifié de sombre par les Hindous) est spirituellement inférieur en regard des êtres des Ages précédant et tout particulièrement ceux qui vécurent au premier Age (comparé à l’or, métal solaire synonyme de perfection). Cet homme, donc, apparaît conditionné, affaibli, incapable de percevoir, le sens supérieur de l’existence. Dans le film des frères Wachowski, la Matrice traduit de façon métaphorique l’état d’aliénation psychique de l’Humanité. Lorsque l’inversion des valeurs sera complète car parvenue au plus bas et, donc, à la fin de l’Age de fer, la Tradition primordiale fera irruption sous les traits d’un personnage hors du commun. Une sorte de rédempteur destiné à inverser le cours de l’Histoire. Dante Alighieri lui attribue un nombre particulier, le 515, précisément crypté dans Matrix. Ce personnage n’est autre que Thomas Anderson, alias Neo, surnom qui, par anagramme, donne One, le seul, l’Elu.



heracles                    K8 2Athena

 

  

Toutes ces références à des thèmes initiatiques sont-elles volontaires ou le résultat d’un singulier concours de circonstances ? A moins d’avoir une réponse précise des réalisateurs et scénaristes, nous ne pouvons que proposer une interprétation toute subjective de ce film exceptionnel. Une remarque s’impose toutefois : Matrix, traduit, certes, les angoisses d’une société désormais privée de repères – car subissant une crise des valeurs morales – et toujours plus dépendante du machinisme informatique. Mais, chose particulièrement remarquable, la réponse qu’un pareil film apporte à cette situation s’inscrit dans le registre eschatologique de la Tradition. Comme, du reste, pour les deux autres grandes épopées du Septième Art : Star Wars et Lord of the Rings. De telles œuvres seraient-elles prémonitoires d’un renouveau espéré et qui surgirait à la fin de l’Age sombre ? « Les événements à venir projettent leur ombre vers nous », a dit Goethe.

 

 

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